Nous traversons une époque historique et inédite au cours de laquelle toutes les populations de la Terre sont touchées par une crise sanitaire sans précédent récent. Trois mois après le début de l’épidémie, la moitié de la population de la planète vit confinée. Jeunes ou plus âgés, riches ou pauvres, malades ou en bonne santé, tous peuvent être touchés ; l’homme se rêvait immortel et il se réveille vulnérable. Nous assistons à un bouleversement de nos valeurs.

Chez beaucoup d’entre nous la peur l’emporte, guide notre conduite et peut parfois brouiller notre lucidité. Nous avons perdu nos repères anciens et cherchons encore de nouvelles marques.

Être confiné pour nous, c’est se être privé d’une certaine liberté d’aller et venir à notre guise, de travailler, de rencontrer des amis, d’avoir ce que l’on appelle une vie sociale, de partir en weekend : cette restriction d’activité liée au confinement, nos enfants polyhandicapés la connaissent dans leur vie quotidienne, souvent immobiles dans leurs fauteuils qui ne roulent pas selon leur volonté, privés partiellement ou en totalité de leurs moyens d’expression, soumis à des agendas qu’ils n’ont pas pu décider.

Et pourtant, comme l’exprime remarquablement Marie Christine Tézenas du Montcel, Secrétaire générale du groupe Polyhandicap France dans un beau texte (« Ce que le monde du grand handicap nous apprend de la résistance ») les personnes polyhandicapées si vulnérables sont peut-être plus résistantes que nous, face à l’adversité. Elles éprouvent depuis longtemps la fragilité de leur corps, l’incertitude du lendemain, la dépendance à autrui.

Plus que jamais, nous prenons conscience que nous avons besoin de ces êtres fragiles autant qu’ils ont besoin de nous. Entre eux, avec nous et avec tous les accompagnants et soignants, ils créent un lien social essentiel dont on redoute tant la disparition. Ils nous réapprennent l’échange, le partage, le sourire désintéressé, juste pour dire merci d’être là, de ne pas m’avoir oublié.

Au-delà de la résilience, nous aspirons tous à la renaissance, mais pas une renaissance du monde d’hier, la naissance d’un monde nouveau, plus juste, plus équitable où la réussite individuelle céderait la place à l’utilité collective, où les grilles de rémunérations seraient réajustées en fonction de cette nouvelle échelle des valeurs, où chacun trouverait sa place.

La crise sanitaire actuelle comme les difficultés économiques à venir ne doivent pas nous faire oublier que les personnes handicapées ont un immense besoin d’aide, de présence et de bienveillance au quotidien pour leur confort et leur survie afin qu’elles puissent se sentir des êtres humains à part entière, citoyens parmi d’autres citoyens.

L’engagement individuel et collectif de nos professionnels au service des personnes polyhandicapées et de leurs familles est digne des valeurs de notre association. Au-delà de la notion de travail, elle rejoint le meilleur de la nature humaine dans la solidarité, l’altruisme et le respect de l’autre.

Remercions l’ensemble des Professionnels, la Direction, les Cadres de notre association d’avoir su s’adapter, se renouveler, innover pour maintenir le bien-être de nos résidents et leur assurer un cadre sécurisé. Ils appartiennent à la colonne des héros de 2020 comme les personnels soignants, accompagnants, applaudis et ovationnés chaque soir à 20h00.

L’engagement des Professionnels du secteur Médico-Social doit être reconnu et valorisé au même titre que celui des Personnels Médicaux et notre société de 2020 doit également tout mettre en œuvre pour garantir aux personnes polyhandicapées une vie digne et sereine.

Thierry LORIN
Président Association les Tout-Petits
Site : https://association-les-tout-petits.org